"Dites, à la vérité, n’avez-vous jamais eu l’impression que vous étiez, irrémédiablement, étranger aux autres personnes, aux évènements de la vie ? Que le monde n’était définitivement pas fait pour vous ? Que l’amour, la joie, l’amitié, c’était pour les autres ?"
Extrait de mon premier roman "La Mort est un jardin"
Ne vous êtes-vous jamais senti parfois, comme ce personnage de roman, étranger au monde, coupé des autres par une sorte de fêlure profonde, désespérément seul au milieu même de vos proches, présent dans la réalité mais en vérité les deux pieds foulant une terre inconnue, un royaume dont vous seriez le seul habitant, arpentant une galaxie d'ombres et de poussière ? Quelle est l'origine de cette étrangeté en nous soudain, de cette petite mort de l'âme que certains nomment stupeur, perplexité ou mélancolie ? Ce néant qui nous inonde n'a justement pas de sens ni d'origine, c'est un pur au-delà où certains plongent et parfois se noient irrémédiablement ; d'autres au contraire y puisent la force de créer, se jouant de l'abîme, passant leur vie entière dans cette fêlure, cultivant leur étrangeté.
Mais quand survient parfois le visage de l'être aimé, quel bonheur, après de si longs voyages intérieurs, de donner des nouvelles de soi dont on sait qu'elles vont enfin intéresser quelqu'un sur Terre !
Image : Portrait, Modigliani
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